Lutter contre les espèces invasives
Publié le 29 avril 2023 par eleve
Erika Roy et Émily-Rose Billette (2023)
En premier lieu, qui sont-elles ?
Avant d’expliquer en quoi notre solution contre les espèces invasives consistera, il est important de faire le point sur ce qu’elles représentent et quels sont les effets des espèces non désirables sur un territoire.
Les espèces invasives sont introduites par erreur ou de manière volontaire dans un écosystème et s’avèrent être un agent de perturbation pour l’environnement où elles vont s’établir. Ces espèces ont une incidence sur le plan environnemental et économique et elles sont également nuisibles pour la santé des humains.
Sur le plan environnemental, ces espèces nuisent à la biodiversité, car elles peuvent mener à l’extinction de certaines espèces, mais aussi au déplacement des espèces qui étaient déjà établies sur le territoire. En effet, les espèces invasives peuvent devenir des prédateurs pour les autres espèces habitant le territoire ou alors entrer en compétition avec les espèces déjà établies dans la région pour la nourriture et les ressources qui s’y trouvent. Ces espèces entraînent aussi la diminution de la diversité génétique et sont une menace pour les espèces en voie de disparition. Elles ont un impact sur la diversité génétique, car certaines espèces envahissantes se reproduisent avec les espèces indigènes habitant nos régions et créent ainsi des croisements entre deux variétés d’une même espèce. Cela constitue alors une menace pour les espèces rares et vulnérables. De plus, elles peuvent altérer la composition et le fonctionnement de nos écosystèmes, entre autres, par la dégradation et l’érosion des sols. Certaines espèces invasives ont la capacité de modifier les cycles biogéochimiques, soit le processus de transport et de transformation d’un élément ou d’un composé chimique d’un milieu à l’autre de la biosphère (géosphère, atmosphère et hydrosphère). Elles arrivent à modifier ces cycles en éliminant les détritivores, ainsi que les décomposeurs qui se trouvent dans l’écosystème.
Sur le plan économique, ces invasions sont aussi nocives, puisque la gestion de ces espèces est souvent difficile et coûteuse. Elles peuvent entrainer des coûts de plusieurs milliards de dollars chaque année. Par exemple, en Suisse, elles ont coûté au moins 1288 milliards de dollars depuis 1970, soit environ 26,8 milliards par année. En 2017, le coût mondial des espèces invasives a été vingt fois supérieur aux budgets de l’OMS et de l’ONU combinés. De plus, elles peuvent avoir un impact négatif sur la productivité forestière et agricole.
Ensuite, certaines de ces espèces peuvent être nuisibles pour notre santé et causer des problèmes d’allergies chez certains individus. Il y a entre autres, le moustique tigre qui fait partie des 10 espèces les plus invasives du monde et qui peut transmettre des maladies graves comme la dengue ou encore le chikungunya. Le rat brun est un des mammifères les plus envahissants originaire du nord-est de la Chine. Cette espèce est responsable de la transmission de la bactérie de la peste via les puces.
Les coccinelles asiatiques, qui à la base, ont été importées d’Asie pour lutter contre les pucerons qui dévastaient nos plantations et qui, très rapidement, ont pris le dessus sur les espèces qui étaient déjà établies en Amérique du Nord. Notamment à cause de leur voracité, elles sont devenues nuisibles pour les coccinelles autochtones qui habitaient notre territoire, mais aussi grâce à leur capacité de pondre jusqu’à 2500 œufs au cours de leur vie. Cela est énorme lorsqu’on les compare aux coccinelles autochtones qui pondent de 10 à 50 œufs par année. Au départ, elles avaient été importées comme solution contre nos pucerons, mais les coccinelles asiatiques sont maintenant une espèce envahissante dévastatrice pour nos coccinelles. C’est un des meilleurs exemples de lutte biologique mal contrôlée.

D’où viennent les espèces envahissantes?
Sachant que ces populations invasives sont un fléau pour la société, comment se fait-il qu’il y en ait autant sur tous les territoires du monde ?
En premier lieu, il faut comprendre que les espèces ne sont pas uniquement introduites sur un territoire de façon volontaire et que parmi les espèces introduites, seulement une espèce sur 1000 devient envahissante. Par contre, la plupart des introductions de nouvelles espèces ont été faites par l’homme. Avec la colonisation, beaucoup de déplacements entre les pays ont eu lieu apportant ainsi le transport involontaire d’espèces invasives, notamment, les insectes qui se trouvaient dans les caves de bateaux et qui, en même temps que les passagers, sont allés coloniser les nouveaux territoires qui s’offraient à eux. Certaines espèces sont encore aujourd’hui introduites sur le territoire par le transport de marchandises. Même que le nombre d’introductions a augmenté avec l’industrialisation, la multiplication des échanges ainsi que le transport de marchandises entre les pays. En 2021, en France, on retrouve 2389 espèces continentales et marines ayant été introduites volontairement ou involontairement. Plusieurs espèces ont également été introduites dans les plans d’eau comme les Grands-Lacs au Canada par navigation maritime. On a identifié 188 espèces aquatiques non-natives établies dans les Grands-Lacs, dont 64 sont considérées comme invasives. De 2011 à 2020, on y a découvert 4 nouvelles espèces de zooplancton, soit le Thermocyclops crassus, le Mesocyclops pehpeiensis, le Salmincola californiensis, et le Diaphanosoma fluviatile.

Il y a ensuite les espèces qui ont été volontairement introduites sur un territoire pour régler un problème que les résidents du pays n’arrivaient pas à régler. Par exemple, les coccinelles asiatiques qui ont été introduites pour nous débarrasser des pucerons. Le ouaouaron a également été introduit volontairement dans certains pays, comme la France, pour l’élevage, mais aussi comme agent de contrôle contre les insectes ravageurs et la peste. Bien sûr, on ne croyait pas que ces espèces deviendraient envahissantes. De plus, l’introduction de nouvelles espèces sur le territoire, notamment pour éliminer une autre espèce envahissante, peut même être une excellente solution, mais il faut être en mesure de contrôler ces espèces si nous désirons obtenir un résultat satisfaisant et pour que cela ne finisse pas par dégénérer, comme dans l’exemple nommé précédemment à propos des coccinelles asiatiques.
Pourquoi les autres espèces sont-elles autant affectées?
Les espèces exotiques envahissantes sont nuisibles aux autres espèces habitant le territoire et donc, menacent inévitablement la biodiversité, non seulement du Québec, mais aussi à l’échelle mondiale. Elles sont considérées comme étant une des principales causes de la perte de la biodiversité sur la planète. En effet, ces espèces représentent un danger pour un tiers des espèces sur la Terre et sont en partie responsables d’environ la moitié des extinctions à l’échelle mondiale.
Certaines espèces envahissantes peuvent être nuisibles aux populations déjà présentes sur le territoire en étant des prédateurs ou des herbivores agressifs (par exemple, la Ctenopharyngodon idella ou carpe herbivore). D’autres représentent une menace, parce qu’elles utilisent une partie trop importante des ressources disponibles qui est essentielle à la survie des autres espèces du milieu, soit l’espace, la lumière (chez les plantes), les ressources alimentaires et l’habitat. Pour ces raisons, il leur est facile de s’approprier un territoire, puisqu’elles arrivent à prendre le dessus sur les autres populations qui s’y trouvent et donc, provoquer la disparition des espèces natives par l’hybridation (croisement entre deux variétés d’une même espèce), la prédation et la transmission de maladies.
Comment peut-on remédier au problème?
Premièrement, on peut procéder par un contrôle biologique des espèces exotiques envahissantes. Cette solution est durable, mais aussi très rentable. La principale technique de lutte biologique est d’introduire un ennemi naturel sur le territoire. Au début des années 80, dans les pays d’Afrique comme le Togo, le Bénin et le Ghana, les feuilles des manguiers et d’agrumes sont subitement devenues noires et la croissance des plantes s’est pratiquement arrêtée. Le problème venait d’une espèce originaire d’Inde et introduite accidentellement en Afrique occidentale, une cochenille du nom de Rastrococcus invadens. Pour lutter contre cette espèce, les services de protection des végétaux, le LITA (Library and Information Technology Association), l’IIBC (International Institute of Biological Control) et la FAO (Food and Agriculture Organization) ont introduit des espèces ennemies de ce parasite, soit le Gyranusoidea tebygi et l’Anagyrus mangicola. De cette manière, ils ont réussi à diminuer de manière naturelle le taux de survie de l’espèce et ont entrainé une diminution de la population invasive. Pour appliquer cette stratégie de lutte biologique, on peut procéder par prédation, parasitisme ou par compétition.

Bien sûr, plusieurs autres solutions pourraient s’offrir à nous, notamment sur la question de limiter l’introduction des espèces exotiques envahissantes. Pour cela, plusieurs étapes sont réalisables, par exemple, la mise en place d’une politique plus stricte sur la régulation de l’entrée de toutes les espèces considérées comme envahissantes dans les différents pays. Il y aurait premièrement la mise en place d’une limitation via les introductions accidentelles de ces populations par voie douanière (transport automobile ou voie maritime) et ainsi réguler l’introduction de certains produits comme les œufs, les graines, car ceux-ci sont susceptibles de véhiculer une espèce qui pourrait devenir envahissante. Deuxièmement il pourrait y avoir un système de traitement pour ces mêmes produits par des techniques de stérilisation ou d’élimination qui ne seraient évidemment pas toxiques pour les individus ou pour l’environnement. Pour les végétaux invasifs, on pourrait, par exemple, procéder à leur élimination grâce à une technique basée sur la stérilisation thermique profonde qui consiste à injecter de l’eau de manière localisée dans le sol à une température de 140°C. Enfin, il faudrait instaurer un système de sanctions sur le non-respect de ces nouvelles lois. Toutefois, ces lois peuvent s’avérer difficiles à mettre en place, puisqu’il faut tenir compte des règles internationales.
Le parasitisme et le myxomavirus en Australie
La lutte biologique est le contrôle des espèces envahissantes par des ennemis naturels qui entraîneront une diminution du taux de reproduction et du taux de survie des espèces invasives. Le parasitisme via l’usage de micro parasites (virus et bactéries) est une forme de lutte biologique souvent utilisée pour les mammifères nuisibles. En Australie, cette méthode de parasitisme a été réalisée par l’introduction d’agents pathogènes. Dans ce cas-ci, on a introduit le myxomavirus en Australie et sur plusieurs îles voisines pour contrôler la population de lapins. La myxomatose est une maladie virale des lagomorphes (ordre de mammifères qui comprend les Léporidés, soit les lièvres et les lapins) très souvent mortelle et elle n’est transmissible ni aux humains ni aux autres animaux.
En effet, les lapins européens étaient devenus une espèce invasive en Australie après y avoir été introduits au XVIII e siècle, puisqu’ils se sont reproduits en grand nombre et rapidement. Ainsi, ces lapins sont devenus nuisibles pour les mammifères habitant déjà le territoire et sont suspectés d’avoir été le facteur le plus important dans la disparition d’espèces en Australie, puisqu’ils auraient diminué la quantité de ressources naturelles disponibles sur le territoire. Leur population était tellement nombreuse que deux millions d’entre eux pouvaient être abattus ou piégés chaque année sans que cela n’ait d’effet sur leur population. En 1950, grâce au scientifique Frank John Fenner, le virus du myxome (myxomavirus) fut répandu dans la population de lapins. À la suite de l’introduction de ce virus, la population de lapins passe de 600 millions à près de 100 millions. Évidemment, l’objectif de cette lutte biologique n’était pas d’éliminer entièrement la population de lapins en Australie, car cela est impossible, mais de maintenir leur population à un niveau raisonnable qui n’est pas nuisible pour l’environnement et l’agriculture. On peut donc conclure que l’objectif a été atteint, car la population de lapins a été considérablement réduite.

Références
Contrôle espèces envahissantes
Définition espèce envahissante
Définition espèce envahissante
Définition, introduction et impacts
Technique de l’insecte stérile et projet World Mosquito