Xavier Leduc et Emma Pelchat-Laflamme (2017)
Crabe de ménage
Publié le 11 mai 2017 par
Crabe de ménage
La beauté ne suffit pas

Que dire de la Grande Barrière de corail si ce n’est que celle-ci s’étale sur un total de 348 000 kilomètres carrés et qu’elle regorge de créatures magnifiques comme, par exemple, une variété de 400 espèces de coraux ? Elle est d’une beauté époustouflante ! Ou bien l’était, car malheureusement, sa beauté n’a pas suffi à stopper les activités humaines désastreuses polluant son environnement.
Si nous nous penchons sur ces activités, les ressources disponibles sur le territoire australien, comme, par exemple le charbon, le minerai de fer, le gaz naturel et l’uranium, sont l’une des causes de la destruction du corail puisque ces ressources sont très convoitées par les industries du monde. Pour pouvoir avoir accès à ces ressources, ces industries doivent envoyer des cargos aux ports de Cairns, Brisbane et Darwin, principaux ports de l’Australie, mais le bord de l’eau étant peu profond, empêche ces cargos d’accoster. Le dragage est donc la solution utilisée par les industries pour rendre les eaux plus profondes, mais cette solution est loin de n’avoir aucun défaut. Lorsque l’opération de dragage a lieu, le sol retiré sur le bord de l’eau, constitué de sable, d’argile et de limon est alors considéré comme un déchet. Ce déchet est, par la suite, jeté dans l’eau et se retrouve donc sur les coraux de la Barrière. De plus, les activités minières et portuaires peuvent être dévastatrices. Certaines compagnies liées à ces activités se permettent de déverser leurs déchets dans l’océan et les lagons, polluant ainsi les eaux de la côte. L’Australie a bien tenté de mettre en place une mesure pour interdire le déversement de ces déchets, mais tous n’en tiennent pas compte. La Barrière s’étalant sur plusieurs milliers de kilomètres, il est donc inévitable que celle-ci soit touchée par toute cette pollution. De plus, le Queensland, un des États de l’Australie, possède un vaste territoire dédié à l’agriculture. Pour bien entretenir ces terres, certains agriculteurs ont recours aux pesticides, mais ces pesticides sont absorbés par les sources d’eaux environnantes et, malencontreusement, se rendent jusqu’à l’océan où ils polluent la Grande Barrière de corail. Toutes ces activités causent une pollution océanique qui ne fait que détériorer la situation de la Barrière.
Cependant, les activités humaines ne sont pas la seule cause de la destruction de la Grande Barrière. Les catastrophes naturelles reliées à l’Australie n’améliorent pas la situation. Les ouragans, les vents violents et les tempêtes sont en partie responsables de sa destruction. Ces catastrophes remuent le sol marin, ce qui détruit et déplace des parties de la Barrière. De plus, le réchauffement climatique cause la fonte des glaciers, ce qui fait augmenter le niveau de l’eau. Lorsqu’il augmente, les rayons du Soleil ne peuvent se rendre assez profondément pour alimenter les algues dont les coraux se nourrissent et ces algues finissent par mourir privant les coraux de leur principale source de nourriture. Plus encore, le pH des océans diminue lorsque le CO2 , produit par les activités humaines, est capté par l’océan puisque le CO2 rend l’eau plus acide. Le corail, comparé au reste de la faune aquatique, ne peut s’adapter aussi facilement à ce changement de pH puisqu’il reste à la même place toute sa vie et est habitué à un pH de 8,2 (pH moyen de l’océan).
Un bon nettoyage

Bien heureusement, la santé de la Barrière de corail peut encore être améliorée. Une solution a été trouvée pour atténuer ce problème : l’élevage de crabes, mais pas n’importe quels crabes évidemment : une sorte de crabes qui nettoie les coraux en mangeant le mucus et la pollution qui se retrouvent sur ceux-ci. Ce sont les crabes Trapezia, surnommés en anglais «Housekeeper» qui signifie « femme de charge». Le mucus ainsi que la pollution ingérés par le crabe ne semblent pas avoir beaucoup d’effets sur lui même si ce mucus est sa principale source de nourriture. À sa mort, la pollution ingérée par le crabe ne retourne pas entièrement dans l’océan sous la même forme qu’au départ puisqu’une partie de celle-ci a d’abord été digérée.
Cette idée d’élevage, qui n’est pas encore utilisée concrètement, ne vient pas directement et complètement des humains. Nous avons simplement eu l’idée d’accélérer le processus de reproduction des crabes pour que ce soit plus efficace. Ce qu’il y a d’extraordinaire avec cette solution, c’est qu’elle est naturelle et n’entraîne que très peu de dommages. Ces petits crabes, mesurant seulement 1 millimètre, dépendent des coraux pour survivre et inversement. Les crabes se nourrissent de ce qu’ils retrouvent sur les coraux et les coraux, en échange, leur offrent une protection contre les prédateurs. La santé des coraux s’améliore ainsi grâce à ces crustacés puisqu’ils retirent les déchets qui se retrouvent sur ces coraux.
Pour bien illustrer cette complémentarité entre ces deux organismes, des scientifiques ont tenté une expérience : qu’arriverait-il aux coraux si les crabes n’étaient pas à leur disposition. Pour ce faire, ils ont soigneusement retiré des crabes de coraux situés autour de l’île de Moorea, en Polynésie Française et, après seulement un mois, le résultat était surprenant : 50% à 80% des coraux étaient en train de mourir. De plus, la croissance des coraux était beaucoup plus lente et ils blanchissaient encore plus rapidement puisque, sans les crabes pour se nourrir des sédiments pollués en provenance des sols marins et des activités humaines, les coraux en absorbent davantage. Le blanchiment des coraux est dû à plusieurs facteurs comme le manque de nourriture, le réchauffement de l’eau, l’augmentation de l’acidité de l’eau et l’augmentation de la pollution et des déchets provenant des activités humaines. Cette solution, bien qu’utile, n’est pas une solution miracle. Bien sûr, elle ralentit grandement la détérioration des coraux puisqu’elle permet une croissance plus rapide et un blanchiment moins précipité de ceux-ci, mais ne l’arrête pas complètement puisque les crabes ne peuvent éliminer toute la pollution à eux seuls. En effet, certains polluants ne sont pas dégradables ou peuvent être néfastes pour le crabe. De plus, ce petit crabe ne peut pas arrêter les catastrophes naturelles.
Cette solution, si on parvenait à l’utiliser concrètement, ne pourrait, à elle seule, sauver la Barrière, mais elle pourrait donner le temps aux scientifiques de se pencher davantage sur ce problème afin de trouver d’autres solutions.
Références: